Théâtre amoureux

Jacques un homme du peuple, un homme étranger, un homme ennemi, obéit à son cœur, suit son instinct, dépasse les frontières autorisées, brave les étendues interdites et arrive au palais défendu pour lui, pour son statut, pour sa personne.

Il aperçoit alors la princesse de celui-ci, divaguant près de la ville. Il apprend alors son nom divin, Céleste, et tombe sous le charme. Elle l’aperçoit également et devint malade d’un amour passionnel. Un peu plus tard, Jacques arrive à se hisser jusqu’aux appartements de la princesse. Surprise, elle empoigne une paire de ciseaux et menace l’intrus avec.

CÉLESTE : Reculez, partez ou j’appelle la garde.

JACQUES : Non je vous en conjure ! Ne faites rien de cela !

CÉLESTE : Et pourquoi devrais-je me plier à vos ordres ?

JACQUES : Car je voudrais que vous écoutiez mes paroles. Je ne suis qu’un danger pour les insectes qui nourrissent les oiseaux. Je ne veux point vous effrayer, je voudrais simplement vous récitez quelques mots.

CÉLESTE : Votre accent n’est pas le mien, d’où venez-vous ?

JACQUES : D’un pays plus lointain que vos frontières.

CÉLESTE : Étranger ! Fuyez avant que l’on vous prenne.

JACQUES : Non, de grâce, je vous en prie, avant que vous ne me chassiez, il est de mon devoir de vous avouez mes sentiments. Je vous aime !

CÉLESTE : Voilà une déclaration bien surprenante.

JACQUES : Certes, cependant, avant que vous ne décidiez de mon amour que je vous porte, il est important que vous sachiez que je ne suis ni de la cour, ni même de votre pays comme vous l’auriez compris. Je ne suis qu’un miséreux de vos ennemis. Pardonnez moi Madame mais le sentiment d’amour que j’ai à votre égard est plus imposant que les frontières qui nous séparent. Je vous aime ! Et même si cela n’est en tout point réciproque, je me devais de vous le faire savoir.

CÉLESTE : Effectivement, voilà diable une situation bien surprenante. Pour ma part, je suis promise à un autre et je ne peux contredire l’ordre d’un père. Je ne déciderai point de votre amour car cet amour n’est que folie. Monsieur, je dois vous demander de me quitter, moi et ce que vous avez apporté à mon égard.

JACQUES : Je ne peux vous quitter sans la certitude que mon amour n’est vain.

CÉLESTE : Je vous dis qu’il est vain.

JACQUES : Et vos sentiments que vous dictent-ils ?

CÉLESTE : Je ne peux exprimer mes sentiments.

JACQUES : Pourquoi donc ?

CÉLESTE : Car vous aimer serait trahir mon père, mon peuple et ma patrie.

JACQUES : Et si tout cela n’existait pas ?

CÉLESTE : Alors… Je ne peux m’exprimer.

JACQUES : Allez-y.

CÉLESTE : Non, je ne dirai pas un mot.

JACQUES : De grâce.

CÉLESTE : N’insistez pas !

JACQUES : Je n’insiste pas.

CÉLESTE : Vous faites bien.

JACQUES : Mais, je voudrais m’exprimer sur l’amour à votre personne.

CÉLESTE : Non partez ou je ne vous entends pas.

JACQUES : Madame je me mets à genoux devant vous pour vous réciter ce que mon cœur me dit.

CÉLESTE : Cessez ou j’appelle la garde !

JACQUES : Madame, je vous en prie ! Des la dernière phrase achevée, je m’en irai.

CÉLESTE : Bon, je vous vois décidé. Allez-y. Mais que cela ne dure longtemps.

JACQUES : Madame je ne peux exprimer ma gratitude.

CÉLESTE : Vite pressez-vous

JACQUES : Bien. Madame si je suis là devant vous c’est pour vous exprimer mon amour. Dès lors que je vous ai vu je suis devenu fou, fou de vous, et je me souviendrai de notre rencontre de ce jour. Madame je vous aime et je ne le nie pas. Je vous aime et quand bien même il y aurait des obstacles, je ne m’en soucie pas. Cupidon m’a touché et même si cela n’est dû qu’à sa maladresse, je me suis laissé guider par ce sentiment qui m’enivre. Malheureusement nos sociétés font barrage et nous aimer librement est impossible. Malgré tout, je crois au miracle, je crois au hasard de la vie et j’espère qu’un jour prochain nous nous aimerons librement. Si ce jour vient à naître mon cœur entier est le vôtre, et mon sort ne tient qu’entre vos mains délicates. Voilà ce que j’avais à vous dire.

CÉLESTE : … Je ne peux dire mot après pareille déclaration (Elle s’avance vers lui.) Je ne puis exprimer mes pensées ni même mes sentiments. (Elle est face à lui.) Les lois m’ordonnent d’enfermer l’oiseau libre de ma volonté mais la porte reste ouverte. Je ne sais comment m’exprimer.

JACQUES : Que dit votre cœur ?

CÉLESTE : De vous aim… Non cela est trop, disposez ou j’avertis mon père de votre présence.

JACQUES : Que de mots grossiers après un tel discours ! Avez-vous réellement enfermé cet oiseau de vie ? Que siffle-t-il ?

CÉLESTE : Son chant reste silencieux, et les bourreaux de fer.

JACQUES : Je refuse de vous quitter ainsi. Sans une réponse, sans une expression de sentiment.

CÉLESTE : Mes sentiments les voilà, l’amour à mon égard n’est en tout point réciproque. Vous m’aimez ? Et bien pour ma part, je ne vous aime pas. Voilà une franchise amplement méritée pour le culot donc vous êtes doté.

JACQUES : Me voilà bien mal récompensé pour tant d’efforts. Il y a déjà bien longtemps que j’aurais dû périr, embroché par vos armées, battu par votre peuple, déchiqueter par vos chiens et me voilà à l’arrivée et l’on me dit que j’ai perdu. Tant d’efforts pour un rien !

CÉLESTE : Navré de vous avoir déçu. Je vous prie maintenant de vous en allez.

JACQUES : Par mille tempêtes, je ne partirai point sans avoir reçu la prise qui m’est due !

CÉLESTE : Vous voilà bien impoli ! Qu’attendez-vous de ma part ?

JACQUES : L’amour que vous avez à mon égard.

CÉLESTE : Je n’en ai point.

JACQUES : Par pitié. N’y a-t-il rien ?

CÉLESTE : Je vous assure mon cher ami que l’amour est minime et l’ordre trop strict.

JACQUES : On ne tombe qu’une seule fois amoureux. Me voilà célibataire de toute passion. Je m’en vais Madame puisque vous y tenez tant, je m’en vais Madame puisque mon amour est vain.

CÉLESTE : Attendez !

JACQUES : Qu’y a-t-il ? Souhaitez-vous à ce point me faire souffrir, souhaitez vous anéantir le moindre courage, la moindre émotion que j’ai eus à votre égard ?

CÉLESTE : Non, je ne veux en aucun cas vous faire souffrir mais si toute déclaration est vaine de ma part c’est par devoir.

JACQUES : Le devoir… Un bien grand mot qui exige de grandes responsabilités… Je vous quitte sur ces mots.

CÉLESTE : Attendez !

JACQUES : Mais qu’y a-t-il à la fin ?

CÉLESTE : Ce n’était que pour vous informer que j’apprécie votre compagnie et que sur ces mots je me dois de vous inviter à venir prendre le thé.

JACQUES : Le thé ? Serait-ce là une plaisanterie ?

CÉLESTE : Mais point du tout, mon bon Monsieur.

JACQUES : Je ne sais que dire. Me voilà le chassé et l’invité.

CÉLESTE : Ce n’était que par courtoisie, je peux très bien vous congédier.

JACQUES : Non, non ne faites point cela.

CÉLESTE : Que décidez-vous ? Allez, allez choisissez où le soleil se lèvera avant votre choix.

JACQUES : Ne me pressez pas Madame ou une erreur sera vite arrivée. Je ne puis accepter votre offre et c’est bien par regret.

CÉLESTE : Pourquoi donc ? Vous aurais-je tant blessé que je ne l’aurais voulu ? Où est passé l’amour que vous me chantiez précédemment ?

JACQUES : Cet amour n’a point disparu, mon cœur bat toujours, mais ce n’est que par frayeur de l’approche d’un garde que je décline votre générosité.

CÉLESTE : Avez-vous fait tout ce chemin pour qu’au final la peur d’un garde vous le fasse rebrousser ? Dans ce cas-là monsieur vous me faites part d’une très grande lâcheté.

JACQUES : Ce long voyage n’a pas été vain Madame car à présent vous savez quels sont mes sentiments à votre égard mais que peut-on décider lorsque le final se déroulera à la potence ?

CÉLESTE : Lorsque l’on séduit une dame, il faut que le sentiment progresse car il n’est pas immédiat.

JACQUES : Je reviendrai, soyez-en certaine.

CÉLESTE : Alors dans ce cas-là je vous attendrai patiemment.

JACQUES : N’y a-t-il vraiment rien au fond de vous qui ressemble à de l’amour ?

CÉLESTE : Peut-être est-ce possible, mais s’il existait réellement il succomberait sous le poids du courroux de mon père.

JACQUES : Alors puis-je espérer cette existence ?

CÉLESTE : Espérez mon ami car l’espoir fait vivre.

JACQUES : Je prendrai votre réponse comme la mienne, sur ce je m’en vais avant que l’on ne m’aperçoive. Madame je m’en vais mais je reviendrai, Madame je vous aime mais vous le savez certainement.

CÉLESTE : Allez-vous en pauvre fou

JACQUES : Oui vous avez raison je suis fou de vous aimer.

CÉLESTE : C’est une certitude.

JACQUES : Je m’en vais mais sachez que ce n’est que par regret.

Jacques enjambe le balcon et s’éloigne. Céleste s’adosse à la barrière et parle tout bas.

CÉLESTE : Sachez que même si cela ne fait qu’une soirée que je vous connais mon cher, cet amour que vous me donnez est réciproque mais je ne pouvais vous le dire et je ne peux l’annoncer car je suis princesse et je ne peux faillir à mon devoir.

Novembre 2018

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